lundi 29 octobre 2012

Lamoureux et l’éloge de la fatigue


« Sa matière fut le rire, et les colonnes Morris furent son soutien le plus fidèle. Homme de cabaret, chansonnier débitant d'une voix aiguë, agile et éraillée des monologues mémorables, Robert Lamoureux fit se tenir les côtes à des milliers de spectateurs pendant plus d'un demi-siècle ». Voilà comment débutait l’hommage posthume du Figaro au chantre du comique populaire, décédé deux jours plus tôt, le  29 octobre 2011, à l’âge de 91 ans.

Robert Lamoureux est considéré aujourd’hui comme le père du « stand-up » moderne. Il a débuté sa carrière à 29 ans, sur les planches des cabarets parisiens. Ses sketches et chansons (« Papa, maman, la bonne et moi », « La chasse au canard »…) lui ont valu un succès rapide. Il s’est retrouvé par la suite devant la caméra (L'Apprenti salaud, de Michel Deville, Arsène Lupin…), puis derrière, avec la réalisation de sept films, dont la série de la Septième Compagnie. Mais c’est au théâtre qu’il a préféré consacrer l'essentiel de sa carrière, avec plus d’une quarantaine de pièces à son actif, dont douze sous sa plume.

Humoriste, acteur, auteur dramatique, scénariste... Robert Lamoureux était aussi poète. D’une poésie qui s’invite au Music-hall entre deux éclats de rire, et qui se retire avec grâce, laissant le spectacle comique reprendre son cours.

mardi 9 octobre 2012

Regarder le monde s’affoler et manger les tomates sur pieds




« Quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle, sur l’esprit gémissant en proie aux longs ennuis… » Ca y est, les rues s’effacent sous la grisaille et l’automne réveil mes humeurs baudelairiennes. C’est le temps du gris et des sanglots longs. Il est de bon ton de tout bouder en cette saison. Le bourdon a remplacé les abeilles. Et si ni la pluie, ni le regret de l’été passé n’affectent votre bonne humeur, laissez donc l’actualité s’en charger !

Paris s’agite. Les députés s’étripent. La crise palpite. Budget maquillé par un mascara politique, la Gauche est une femme futile. La révolution n’aura pas lieu et les maris cocus baissent leurs yeux. Un brave homme à l’Elysée se perd dans un costume trop grand. Dans la rue, les moutons se font chiens : c’est l’heure d’aboyer tous du même ton, tandis que tangue la caravane.

Au Parlement on parle, on ment. Presque une comptine... Voilà que l’on veut marier des femmes entre elles, faire enfanter les hommes entre eux. Fi de la mécanique, puisque l’on a droit à tout et que la question des devoirs n’arrivera qu’à l’heure des comptes ! Qu’une voix s’élève, on l’égorgera gaiement d’une mauvaise foi bien aiguisée. Peste soit de la religion et des religieux, empêcheurs de se marier en rond !

Paris s’agite et je regarde ce petit monde s’affoler, avec l’envie irrésistible d’envoyer tous ces danseurs valser. Et avec eux mes longs ennuis.

Allons donc, tant qu’il y a du vin, il y a de l’espoir ! Et avec l’automne viennent les vendanges. Je connais là-bas un petit jardin, au creux d’une vallée boisée, où les raisins alignés attendent la presse. On y sent la terre et le vert, on y goute la liberté. Dans un rang voisin, au milieu des salades et autres carottes, le soleil d’automne fait éclater de jus les dernières tomates. Mangez-les sur pieds, c’est un élixir d’oubli ! Qui se souci ici de la course des hommes ?

Votez vos lois, chers députés. Disputez les, meutes enragées. Je vous observe de loin et tente de vous oublier. Laissez-moi vous fuir, un instant, juste le temps de profiter un peu des choses essentielles : le raisin, les tomates… Et quelques abeilles.


« Et puis merde 
J'ai décidé de vivre loin sur la colline 
Vivre seul dans une maison 
Avec la vue sur ma raison 
Je préfère vivre pauvre avec mon âme 
Que vivre riche avec la leur 
Et si le blé me file du bonheur 
Je me ferai peut-être agriculteur… »

(Ridan, L'Agriculteur)